Chronique 29 - L'entreprise, lieu de renaissance de la démocratie et de la République Organiser l'expression de tous les salariés et de toutes les parties prenantes : l'opportunité du Comité social et économique
Au-delà de l'obligation légale, donner la parole à tous les salariés vise à mieux comprendre et mieux développer le lien de l'entreprise avec toutes ses parties prenantes.
Une entreprise ne vit pas dans un monde isolé : les territoires dans lesquels elle opère produisent des règles et habitudes qui la transpercent ; ses collaborateurs ne laissent pas leurs enjeux personnels au vestiaire. Chacun est plongé en simultané dans ses trois sphères professionnelle, personnelle et sociétale. La performance durable de l'entreprise provient donc de sa capacité à combiner la diversité des intérêts particuliers et collectifs dans un intérêt général supérieur qui la sublime et la dépasse. Cela requiert un prisme dans lequel tous les acteurs se reconnaissent.
Partager un diagnostic n'est envisageable que si toutes les parties prenantes disposent d'une même grille d'analyse applicable à la diversité des enjeux. Alors seulement, il devient possible de mieux distinguer, comparer et conjuguer les différentes aspirations, perceptions et pratiques. Reste alors à organiser le partage des informations et le croisement des analyses pour placer chacun en situation de se comprendre et de comprendre les autres.
Mais, créer les conditions de l'expression et de l'écoute des constats et besoins de changement suppose le déploiement d'un processus participatif rigoureux. Adopter des pratiques managériales et relationnelles qui favorisent l'émergence d'une culture du respect des personnes, des faits et des idées est indispensable. Or, cela ne relève pas seulement de la transformation des comportements. Pour être attractive et légitime, cette réflexion collective doit se dérouler dans un cadre neutre, constructif, transparent et ouvert à tous. Alors, il devient imaginable de construire des liens durables, cohérents et convergents à long terme, avec tous les collaborateurs ainsi qu'avec les clients, actionnaires, collectivités publiques, ONG...
Mais, donner la parole à toute la variété des statuts revient, in fine, à la donner aux citoyens. Or, engager le plus grand nombre dans la réflexion collective n'est imaginable que si l'on organise la recherche conjointe de l'intérêt général à long terme. Comment impliquer la diversité des acteurs dans des sujets enchevêtrés ? Cette ouverture ne devient utile que si elle se donne plusieurs objectifs complémentaires, tous indispensables à la performance durable de la Personne, de l'Entreprise et de la société :
1/ FORMATION PROFESSIONNELLE > Transmission de savoirs, savoir-faire et savoir-être :
- Mieux comprendre ses forces et faiblesses
- Mieux percevoir le fonctionnement de l'entreprise
- Mieux embrasser le fonctionnement du secteur d'activité économique
>> Développement personnel de tous les participants.
2/ FORMATION CITOYENNE > Conjugaison des intérêts particuliers avec l'intérêt général :
- Donner à tous les acteurs une vision objective de la situation et des enjeux sociétaux
- Développer une prise de conscience par chacun de ses propres attitudes et pratiques
- Repérer, adapter et mettre en œuvre les bonnes pratiques citoyennes
>> Eveil à la citoyenneté.
3/ REFLEXION INTERNE > Construction de diagnostics approfondis et de projets innovants :
- Collecter, partager les informations, idées et analyses
- Construire des diagnostics partagés sur l'entreprise et chacune de ses parties prenantes
- Définir des projets de développement des salariés, clients, fournisseurs, acteurs publics
>> Innovation utile à tous : produits, services, organisation.
4/ REFLEXION SOCIETALE > Faire vivre l'expérience pratique du débat serein et non partisan :
- Comprendre ensemble le fonctionnement actuel et possible de la société
- Permettre une expression constructive de tous dans un cadre non conflictuel
- Réaliser des diagnostics attentifs et approfondis sur des sujets de société
>> Définir une vision collective de l'avenir à la fois réaliste et ambitieux.
5/ COHESION SOCIALE INTERNE > Construire la responsabilité et la solidarité :
- Mettre en œuvre un nouveau mode relationnel et managérial
- Optimiser tous les vecteurs de lien entre l'entreprise, ses salariés et interlocuteurs
- Ajouter un étage à l'organisation et à la gouvernance de l'entreprise
>> Transformation sereine : préparer le changement et prévenir les crises.
6/ COHESION SOCIETALE > Animation de la démocratie et du contrat social républicain :
- Entretenir la spirale de l'engagement citoyen, du bénévolat et du volontariat,
- Renforcer les pratiques citoyennes
- Faire remonter des propositions aux élus et au système public
>> Réconcilier l'entreprise et la société.
Il s'avère donc qu'impliquer le salarié dans l'entreprise réclame et exige d'impliquer aussi le citoyen dans la cité. Et réciproquement ! Ainsi, dans la même mécanique du nouveau Comité social et Economique (CSE), obligatoire pour les entreprises de plus de dix salariés à compter du premier janvier 2020, il devient possible et nécessaire de chercher à réinventer ensemble une nouvelle société pour mieux vivre ensemble avec tous :
- Avec les dirigeants : définir les orientations stratégiques
- Avec les salariés : repenser le travail comme vecteur d'épanouissement
- Avec les clients : inventer de nouveaux produits
- Avec les fournisseurs : mettre au point des circuits courts
- Avec les syndicats : optimiser les conventions collectives
- Avec les associations : structurer le développement durable
- Avec les élus locaux : construire des projets de territoire
- Avec les parlementaires : préparer les lois
Cette contrainte du CSE est donc l'opportunité géante de réécrire tous ensemble le pacte républicain. L'instauration du débat dans les entreprises et les territoires est l'occasion d'activer la force créatrice de tous au service de tous et de réparer la méritocratie républicaine et l'ascenseur social. Décideurs des sphères économique, politique et sociale : unissez-vous !
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NOTES
(*) Afin d'éviter les écueils des faux dialogues générateurs de suspicion, de rupture et de conflits, La Tribune ouvre ses colonnes à l'Odissée. Pilotée par son directeur et expert de la dialectique, Jean-François Chantaraud, la chronique hebdomadaire « Ne nous fâchons pas ! » livrera les concepts, les clés opérationnelles de la méthode en s'appuyant sur des cas pratiques et sur l'actualité.
L'Odissée, l'Organisation du Dialogue et de l'Intelligence Sociale dans la Société Et l'Entreprise, est un organisme bicéphale composé d'un centre de conseil et recherche (l'Odis) et d'une ONG reconnue d'Intérêt général (les Amis de l'Odissée) dont l'objet consiste à "Faire progresser la démocratie dans tous les domaines et partout dans le monde".
Depuis 1990, l'Odissée conduit l'étude interactive permanente Comprendre et développer la Personne, l'Entreprise, la Société. Dès 1992, elle a diffusé un million de Cahiers de doléances, ce qui l'a conduit à organiser des groupes de travail regroupant des acteurs des sphères associative, sociale, politique, économique qui ont animé des centaines d'auditions, tables rondes, forums, tours de France citoyens, démarches de dialogue territorial et à l'intérieur des entreprises.
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